Aller au contenu

Silence et clôture

« Dans le silence et l’espérance sera votre force » (Is 30, 15) Règle du Carmel.

Dans la vie contemplative, je considère important de faire attention au silence habité de la Présence, comme un espace nécessaire d’écoute et de ruminatio de la Parole, précédé d’un regard de foi qui accueille la présence de Dieu dans votre histoire personnelle, dans les frères et les sœurs que le Seigneur vous donne et dans les événements du monde contemporain. Le silence est vide de soi-même pour faire place à l’accueil. Dans le bruit intérieur on ne peut recevoir ni rien ni personne. Votre vie intégralement contemplative demande le temps et la capacité de faire silence pour écouter Dieu et le cri de l’humanité. Que se taise donc la langue de la chair et que parle la langue de l’esprit, animée par l’amour que chacune de vous a pour son Seigneur. Pour cela vous avez comme exemple le silence de Marie Très Sainte qui a pu accueillir la Parole parce qu’elle était une femme de silence ; pas un silence stérile, vide, mais au contraire un silence plein, riche. Le silence de la Vierge Mère est un silence riche de charité qui dispose à l’accueil de l’Autre et des autres.

Votre vie entièrement donnée acquiert un fort sens prophétique : sobriété, détachement des choses, don de soi-même dans l’obéissance, transparence dans les relations, tout pour vous est rendu plus radical et exigeant par le choix de renoncer même à l’espace, aux contacts, à tant de biens de la création, comme une façon particulière de donner son « corps ». Avoir choisi une vie de stabilité devient signe éloquent de fidélité pour notre monde globalisé et habitué à des changements toujours plus rapides et faciles, avec le risque de ne plus avoir de racines. Même le domaine des relations fraternelles est rendu plus exigeant par la vie cloitrée qui impose dans la communauté des relations continues et de proximité. Vous pouvez être un exemple et une aide pour le peuple de Dieu et l’humanité d’aujourd’hui, marquée et souvent déchirée par tant de divisions, en restant à côté du frère et de la sœur même là où il existe des différends à régler, des tensions et des conflits à gérer, des fragilités à accueillir.

Pour la vie religieuse, la clôture exprime matériellement la séparation du monde, contribuant à créer une atmosphère et un environnement favorable au recueillement, nécessaire à ceux qui se consacrent à la contemplation.

Dans la vie contemplative des moniales, l’aspect de la séparation du monde mérite une attention particulière du fait de la haute estime que la communauté chrétienne nourrit envers ce genre de vie, signe de l’union exclusive de l’Église-Épouse avec son Seigneur suprêmement aimé.

La clôture évoque cette cellule du cœur où chacun est appelé à vivre l’union avec le Seigneur. Accueilli comme un don et choisi comme une libre réponse d’amour, c’est le lieu de la communion spirituelle avec Dieu et le prochain, où la limitation de l’espace et des contacts procure un avantage pour l’intériorisation des valeurs évangéliques.

La clôture est une manière de vivre la Pâque du Christ, comme une annonce joyeuse et une anticipation prophétique de la possibilité offerte à chaque personne et à toute l’humanité de vivre uniquement pour Dieu, en Jésus Christ.

« Dans le silence et l’espérance sera votre force. » Règle du Carmel

Cette affirmation m’a parue lumineuse, et correspondre à une intuition personnelle vers le Carmel : Communauté contemplative en clôture.

Le silence matériel favorise le silence du cœur pour l’écoute de la « parole intérieure », dans la récitation de l’Office liturgique, la lecture spirituelle, l’oraison… En faveur de la conversion du cœur et pour entrer véritablement en charité fraternelle. C’est une écoute intérieure affectueuse, amoureuse. Avec le Christ, la Vierge.

Ce chemin suppose l’appel de Dieu aimé par-dessus tout pour entrer dans cette voie particulière de disponibilité à la Grâce de Dieu. La Providence a préparé ce chemin pour moi. J’étais la quatrième d’une famille de huit enfants ; pendant la guerre de 40, j’ai connu la pension loin de ma famille, puis retour pour suivre l’enseignement commercial : un vrai bouleversement de milieu. Finalement la question de mon avenir m’a été posée sans que j’y ai vraiment réfléchi ! Spontanément, j’ai été inspirée pour demander la profession d’infirmière. La grâce de la vocation de carmélite m’a été donnée dans le fait de voir un malade qui souffrait à l’extrême : j’ai vu le visage du Christ. On pouvait se parler sans dire de mots. Ce parcours a été une grâce formatrice pour la Carmel : silence et clôture dans l’union à Dieu par la prière et le service de la charité fraternelle.

Une carmélite